Tunisie : l’inflation roule au ralenti, mais la vie continue de coûter cher
Alors que les statistiques officielles affichent un ralentissement de l’inflation, le quotidien des Tunisiens reste sous la pression de la flambée des prix des produits de base. C’est le constat nuancé, mais sans appel, dressé par Elyes Asmi, directeur central des statistiques à l’Institut national de la statistique (INS), lors d’une interview sur une radio ce mardi 7 octobre.
Une moyenne nationale qui masque les réalités individuelles
L’expert a d’emblée tenu à rappeler une distinction cruciale, le taux d’inflation mensuel est une photographie moyenne de l’économie. « Aucun citoyen ne s’y retrouve exactement », a-t-il souligné, précisant que chaque foyer a son propre panier de consommation, priorisant l’alimentation, les transports ou l’éducation.
Pour construire cet indice, l’INS procède à un travail de fourmi, plus de 120 000 relevés de prix sont effectués chaque mois. Une méthodologie rigoureuse qui s’adapte à la volatilité des produits. Les articles stables, comme le mobilier, sont contrôlés mensuellement, tandis que les denrées périssables, tels les fruits et légumes, sont scrutés quotidiennement sur les marchés. Les agents, équipés de tablettes, bénéficient même d’un système d’alerte automatique en cas d’écart de prix suspect, garantissant la fiabilité des données avant leur consolidation.
Ralentir n’est pas baisser : le décryptage nécessaire
Le cœur du message d’Elyes Asmi réside dans une clarification essentielle, souvent mal comprise par le public : « Une baisse du taux d’inflation ne signifie pas une baisse des prix, mais que la vitesse d’augmentation des prix diminue. »
Une métaphore parlante résume cette situation : « En 2023, nous roulions à 100 km/h, aujourd’hui à 50 km/h. Nous avançons toujours, mais plus lentement. » Après le pic inflationniste de 2023 (10,4 %, avec 16,1 % pour l’alimentaire), alimenté par la crise post-pandémique et la guerre en Ukraine, le rythme s’est donc modéré, sans pour autant inverser la tendance haussière.
Les postes de dépenses qui pèsent sur le pouvoir d’achat
Les chiffres de septembre 2025 illustrent cette pression persistante. Si l’inflation alimentaire affiche un léger recul à 5,7 % (contre 5,9 % en août), certaines catégories continuent leur ascension vertigineuse. Les légumes (+21,1 %) et la viande ovine (+20,2 %) caracolent en tête, suivis par les fruits et poissons (+10 %), les vêtements et chaussures (+9 %) et les restaurants et cafés (+10 %).
L’éducation privée n’est pas en reste, avec des hausses de 6 à 6,8 % pour le primaire et le secondaire, et de 5,4 % pour les cours de soutien. Une augmentation concrètement ressentie par les parents lors de la rentrée scolaire, où le prix d’une crèche peut ainsi passer de 150 à 170 dinars.
Sur le mois écoulé, la tendance haussière se confirme : +1,3 % pour les produits alimentaires et +3,7 % pour les services éducatifs entre août et septembre. Les volailles (+5,6 %) et les œufs (+4,2 %) ont encore renchéri entre septembre et octobre.