Agrumes à Sidi Bouzid : Une production en hausse, mais des défis persistants
La filière agrumicole de la région de Sidi Bouzid affiche une croissance remarquable, avec une récolte estimée cette année à plus de 14 000 tonnes. Cependant, cette progression masque des difficultés structurelles qui pourraient, selon plusieurs professionnels, compromettre la campagne en cours.
Une expansion spectaculaire des superficies et de la production
Selon Nabil Ayouni, responsable à la délégation de Regueb, les superficies dédiées aux agrumes ont connu une forte progression, passant de 228 hectares en 2017 à plus de 486 hectares en 2024. La grande majorité de ces plantations, soit 430 hectares, se concentre dans la région de Regueb, le reste étant réparti entre Jelma, Sidi Bouzid Est, Sidi Ali Ben Aoun et Menzel Bouzaïane.
Cette expansion a entraîné une augmentation significative de la production, multipliée par plus de cinq en quelques années, puisqu’elle est passée de 2 500 tonnes à plus de 14 000 tonnes. La quasi-totalité de cette production est destinée au marché local. M. Ayouni attribue cette réussite à l’adoption de techniques d’irrigation modernes, une gestion optimisée de l’eau et des conditions naturelles favorables. Les variétés cultivées sont principalement les agrumes « quatre saisons », le maltais et le thomson, auxquelles s’ajoutent des variétés précoces comme la clémentine.
Des obstacles qui menacent la rentabilité
Malgré ces chiffres encourageants, les agriculteurs se heurtent à plusieurs écueils. Ils dénoncent un manque criant de main-d’œuvre qualifiée, une mauvaise maîtrise des techniques agricoles – se traduisant par un usage excessif d’engrais, de produits phytosanitaires et d’eau –, la flambée des coûts de production et l’émergence de nouvelles maladies.
Ala Nasri, agriculteur à Regueb, précise que la récolte des agrumes pâtit particulièrement de la pénurie et du coût élevé de la main-d’œuvre spécialisée, une problématique accentuée par la concomitance avec la cueillette des olives. Il alerte également sur l’impact des changements climatiques, notamment le déficit pluviométrique qui freine la croissance des arbres en privant ces derniers des sels minéraux habituellement apportés par les pluies.
Commercialisation et logistique : le chainon manquant
Un autre défi de taille réside dans la commercialisation et le transport. Habib Nasri, également agriculteur à Regueb, pointe du doigt les difficultés rencontrées pour acheminer les fruits vers les marchés de gros en raison des restrictions imposées par les équipes de contrôle économique et sécuritaire.
Il lance un appel pour une solution urgente afin de faciliter l’évacuation des récoltes. Ces entraves, selon lui, contraignent les producteurs à vendre leurs fruits « sur pied » à des prix dérisoires, souvent en deçà de leurs coûts de production.
Pour une filière durable et compétitive, M. Nasri estime indispensable la mise à niveau des exploitations, la création de groupements de développement agricole, l’installation de plateformes d’exportation aux normes internationales et un contrôle renforcé des plants importés. Autant de leviers pour consolider les acquis et assurer l’avenir de la filière agrumicole dans la région.

